samedi 17 mai 2014

La campagne masquée d'Elio Di Rupo.

Bien avant d'être candidat à sa succession, il était déjà en campagne. Pour lui, et non pour son parti. Sous sa cape de Premier ministre, Elio Di Rupo a bâti sa stratégie électorale depuis des mois, principalement à travers le Hainaut.

Candidat à sa succession, Elio Di Rupo n'a pas attendu le congrès du PS du 23 mars pour mener campagne. Entre octobre 2013 et mars 2014, la fréquence de ses rencontres de proximité s'est accélérée dans le Hainaut. Sous l'appellation "Elio Di Rupo répond à vos questions", 17 séances y ont été organisées dans différentes communes, en soirée la plupart du temps. Des initiatives similaires ont également eu lieu au sein de plusieurs universités, en Wallonie, à Bruxelles et en Flandre.

Les rencontres organisées ont fait l'objet d'une campagne de communication uniforme et parfaitement rodée. "Ces rencontres de terrain n'ont aucun rapport avec les élections, assure son attaché de presse. Le Premier ministre tient simplement à présenter le travail accompli ces dernières années, notamment en matières socio-économiques. Dans la mesure du possible, il tente de répondre positivement à toutes les invitations qui lui sont transmises." Et à travers ces séances de questions-réponses, Di Rupo chef du gouvernement a mis au point la formule de campagne de Di Rupo candidat aux élections du 25 mai. L'essentiel du discours : une présentation Powerpoint pédagogique et chiffrée, illustrant les accomplissements du gouvernement fédéral depuis la crise de 2008. "Elio Di Rupo règle la question de la proximité en proposant directement à l'assemblée une tournée de micro, puis il ne dévie plus de la trajectoire de son discours durant l'heure qui suit", analyse Nicolas Baygert, professeur en sciences politiques et sociales à l'IHECS et chercheur au Lasco (UCL), qui était dans l'assemblée lors d'une étape hennuyère du roadshow di rupien, en février dernier.

Politologue à l'ULg, Pierre Verjans partage ce sentiment après avoir assisté à une présentation similaire le 17 mars, devant 300 étudiants de l'université. "J'ai été frappé par sa capacité à contourner les questions politiques significatives. Le reste de l'exposé était un discours de campagne, même si Elio Di Rupo n'y défendait pas les acquis de son parti, mais plutôt sa capacité de conciliateur." Dans ses présentations, la récurrence d'un cliché le montrant prêter serment devant le Roi, entouré par une nuée de micros, illustre l'importance suprême qu'il accorde à son arrivée au pouvoir. La photographie apparaît à chaque fois qu'il évoque un accomplissement personnel ou collectif au sein du gouvernement. "Pour lui, cette prestation de serment équivaut au baptême de Clovis, observe Nicolas Baygert. Comme si son arrivée au pouvoir traduisait la reprise d'un tournant optimiste."

Pointeur laser en main, Elio Di Rupo encercle des chiffres, décrypte le mécanisme de la sécurité sociale et s'attarde volontairement sur les contraintes communautaires qui pèsent sur l'action gouvernementale. D'un meeting à l'autre, ses premiers mots en tant que conférencier sont toujours les mêmes : "Avant de répondre à vos questions, il me paraît essentiel de vous expliquer le plus simplement du monde quel est ce pays dans lequel nous vivons." Derrière lui, dans un recoin de la salle, un assistant fait défiler un diaporama dont l'écriture, de couleur blanche sur fond rouge, rappelle inlassablement la charte graphique du PS.
Christophe LeroyJournaliste

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